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1 December 2011 Analyse de la Flore des Alpes. 2: Biodiversité et Chorologie
David Aeschimann, Nathalie Rasolofo, Jean-Paul Theurillat
Author Affiliations +
Abstract

Aeschimann, D., N. Rasolofo & J.-P. Theurillat (2011). Analysis of the flora of the Alps. 2: biodiversity and chorology. Candollea 66: 225–253. In French, English and French abstracts.

The second in a series, this paper continues the statistical analysis of the data published in «Flora alpina». The characterization of biodiversity encompasses the altitudinal and worldwide distribution of the taxa. For each vegetation belt, the following results are provided: the numbers of families and genera, as well as lists of the most important ones, characteristic ones, and ones richest in endemics; the number of taxa that are present or exclusive; the rate of endemism; a cartographic pattern of endemism; and the number of taxa from each floristic contingent. Comparisons are made between the western and the eastern Alps, showing that the bicentrism is more pronounced in the lower belts. The relative weight of each floristic contingent is provided for the total flora and for the xenophytes, as well as being presented in the form of cartographic patterns for the main contingents. With almost a third of the taxa, the South-European montane contingent is the most important one. It is demonstrated that in the Alps, taxonomic richness is positively correlated with the relative weight of the Mediterranean contingent. The families and genera characterizing South-European montane and Arctic-Alpine contingents are listed.

Introduction

Dans le premier article de cette série (Aeschimann & al., 2011) consacrée à l'analyse statistique des données publiées dans le «Flora alpina» (Aeschimann & al., 2004), les questions relatives à la nomenclature et à la chorologie dans les Alpes ont été traitées. Un historique a été dressé et la biodiversité des plantes vasculaires de l'arc alpin a été quantifiée et caractérisée, notamment en termes de richesse aréale et d'endémisme. Les patrons cartographiques obtenus confirment les différences floristiques entre les Alpes occidentales et orientales, mettant en évidence le bicentrisme évoqué récemment par Ozenda (2009: 1097). Ce deuxième article aborde les rubriques 17 et 20 des fiches du «Flora alpina» (1: 28, 34–35), qui concernent la distribution mondiale et altitudinale de chaque taxon. Les autres données (biologie, phénologie, écologie, milieux et phyto sociologie), soit celles des rubriques 10, 11, 12, 14, 18, 19, 21 et 22 des fiches du «Flora alpina» seront analysées dans les prochains articles de cette série (en préparation).

Le présent travail poursuit la caractérisation et la quantification de la biodiversité, mais en introduisant d'une part une troisième dimension, les étages de végétation, et d'autre part en s'intéressant à la chorologie au niveau mondial. L'objectif est de répondre à diverses questions, regroupées ci-dessous en trois sections reprises dans les chapitres suivants.

Biodiversité par étage de végétation

  1. Combien de familles sont-elles représentées à chaque étage de végétation? Quelles sont, par étage, les familles les plus importantes (nombres de taxons, %)? Comment les proportions des familles varient-elles en fonction de l'altitude?

  2. Combien de familles comportant au moins un taxon endémique sont-elles représentées à chaque étage? Quelles sont, par étage, les familles les plus riches en taxons endémiques? Comment les taux d'endémiques des familles varient-ils en fonction de l'altitude?

  3. Combien de genres sont-ils représentés à chaque étage? Quelles sont, par étage, les genres les plus importants (nombres de taxons, %) ? Comment les proportions des genres varient-elles en fonction de l'altitude?

  4. Combien de genres comportant au moins un taxon endémique sont-ils représentés à chaque étage? Quels sont, par étage, les genres les plus riches en taxons endémiques? Comment les taux d'endémiques des genres varient-ils en fonction de l'altitude?

  5. Combien de taxons (endémiques, indigènes, xénophytes) sont-ils recensés dans chaque étage? Comment le taux d'endémisme varie-t-il en fonction de l'altitude?

  6. Combien de taxons sont-ils exclusifs de chaque étage et quelles sont les proportions d'endémiques parmi ces taxons?

Alpes occidentales et orientales

  1. Combien de taxons sont-ils recensés dans les deux parties principales de l'arc alpin (Alpes occidentales et orientales) et comment expliquer les éventuelles différences?

  2. Combien de taxons indigènes non endémiques sont-ils recensés à chaque étage dans les deux parties principales de l'arc alpin et comment expliquer les éventuelles différences? Quelle est, pour ce groupe de taxons, globalement et par étage, la similarité floristique entre les Alpes occidentales et orientales?

  3. Combien de taxons endémiques sont-ils recensés à chaque étage dans les deux parties principales de l'arc alpin et comment expliquer les éventuelles différences? Quelle est, pour ce groupe de taxons, globalement et par étage, la similarité floristique entre les Alpes occidentales et orientales? Quels sont, globalement et par étage, les taux d'endémisme dans les Alpes occidentales et orientales? Des patrons cartographiques d'endémisme propres à certains étages peuvent-ils être mis en évidence?

Distributions mondiales

  1. Quels sont les poids relatifs des divers contingents floristiques dans les Alpes (distributions mondiales des taxons) ?

  2. Quelles sont les provenances géographiques des xénophytes recensés dans les Alpes?

  3. Quels sont les principaux contingents floristiques à chaque étage de végétation?

  4. Des patrons cartographiques du poids relatif de certains contingents floristiques peuvent-ils être mis en évidence? Une corrélation peut-elle être établie entre l'un des ces patrons et celui déjà dressé pour la richesse aréale (Aeschimann & al., 2011: 46) ?

  5. Quels sont les genres et les familles caractéristiques des cortèges floristiques sud-européen-montagnard et arcticoalpin?

Matériel et méthodes

Les informations générales concernant cette série d'analyses de la Flore des Alpes ont été fournies précédemment (Aeschimann & al., 2011: 28–31), soit celles traitant de la dition, de ses cinq secteurs et de ses 29 divisions administratives, ainsi que celles relatives aux taxons considérés, aux indications chorologiques et à la base de données. Seuls les renseignements spécifiques à ce deuxième article sont donnés ci-après.

Etages de végétation

Cinq étages de végétation sont traditionnellement reconnus dans les Alpes: collinéen, montagnard, subalpin, alpin et nival. Dans le «Flora alpina» (1: 34–35), les indications de présence d'un taxon dans chacun des étages sont données en précisant si le taxon est régulièrement présent dans l'étage (bleu foncé) ou si sa présence y est faible, voire occasionnelle (bleu clair). Cette distinction n'est toutefois pas retenue pour les présentes analyses statistiques, un taxon étant alors soit absent, soit présent dans un étage de végétation (quel que soit son degré de présence). Les résultats sont complétés par un décompte des taxons exclusifs de chaque étage, c'est-à-dire des taxons dont la présence est limitée à un seul étage. On répond ainsi au souhait exprimé par Ozenda (1985: 234) concernant l'évaluation numérique de la flore de l'étage alpin.

Quatre regroupements d'étages sont de plus établis, afin de fournir des résultats relatifs à des tranches altitudinales correspondant à des critères plus larges: collinéen-montagnard (étages des forêts feuillues caducifoliées), collinéen-montagnardsub alpin (étages situés sous la limite altitudinale des forêts), subalpin- alpin-nival (étages d'altitude, domaine des orophytes «au sens large»), alpin-nival (étages de haute altitude, situés au-dessus de la limite altitudinale des forêts et domaine des orophytes «au sens strict»). Etant donné que la notion d'orophyte n'est pas définie de manière exacte et univoque (voir notamment Favarger (1972a, b, 1995), Körner (1995), Ozenda (1985, 2009), Ozenda & Borel (2003), Pawlowski (1970), Theurillat (1995), Theurillat & Guisan (2001) et Theurillat & al. (1998)), le lecteur trouvera plus bas selon ses propres critères les chiffres qu'il recherche, par étage ou regroupement d'étages.

Alpes occidentales et orientales

Toute comparaison floristique chiffrée des deux parties de la chaîne des Alpes implique le choix d'une limite géographique. Comme relevé précédemment (Aeschimann & al., 2011: 29), la question de savoir où placer cette limite entre les Alpes occidentales et orientales retient l'attention des phytogéographes et des floristes depuis longtemps. Dans un exposé des faits, Favarger (1972b: 194; 1995: I: 34) précise qu'un choix est difficile entre la limite allant du lac de Constance au lac de Côme (CHODAT & PAMPANINI, 1902; Pampanini, 1903) et celle qui va du lac Léman au lac Majeur (Merxmüller, 1952). Toutefois, dans l'un de ses travaux, Favarger (1972a) retient la limite proposée par Merxmüller (1952). Une majorité d'auteurs (voir Aeschimann & al., 2011: 29) adoptent néanmoins la limite Bregenz-Côme, devenue classique et autour de laquelle un consensus se dessine aujourd'hui (Ozenda & Borel, 2006: 3–4). C'est la limite utilisée dans ce travail pour séparer les Alpes occidentales et orientales. Autrement dit, pour ces analyses, les Alpes occidentales se composent de trois secteurs géographiques précédemment établis, soit les Alpes sudoccidentales, nord-occidentales et centrales (voir Aeschimann & al., 2011: 29–30), alors que les Alpes orientales réunissent les deux secteurs des Alpes ouest- et est-orientales.

Pour calculer la similarité floristique entre les Alpes occidentales et orientales, le coefficient de Jaccard (1900, 1901a, b, 1902, 1908) est retenu, soit:

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où «com» est le nombre de taxons communs aux deux parties des Alpes, alors que «occ» et «or» sont les nombres de taxons propres aux Alpes occidentales et orientales respectivement. A noter que Jaccard a introduit ce coefficient de similarité floristique dans cinq publications, mais ce n'est que dans celle de 1902 (p. 72) qu'il est formellement établi, sous le nom de «coefficient de communauté florale».

Distributions mondiales

La distribution mondiale de chaque taxon est indiquée de manière simplifiée dans le «Flora alpina» (1: 28), au moyen de 31 abréviations souvent combinées par le signe «/». Sur un total de 178 possibilités que recèlent les fiches de l'ouvrage, 21 groupes principaux sont constitués pour les présentes analyses, chacun des 4485 taxons traités (Aeschimann & al., 2011: 30) étant attribué à l'un des 21 contingents floristiques suivants:

Am. =

américain

Arct.-Alp. =

arctico-alpin

Asiat. =

asiatique

Austr. =

australien

Cosmop. =

cosmopolite

Eur. =

européen

Eur./N-Am. =

européen/nord-américain

Eur.-Mont. =

européen-montagnard

Eurasiat. =

eurasiatique

Eurasiat./Afr. =

eurasiatique/africain

Eurasiat./Am. =

eurasiatique/américain

Eurosib. =

eurosibérien

Eurosib./N-Am. =

eurosibérien/nord-américain

Médit. =

méditerranéen

Médit.-Mont. =

méditerranéen-montagnard

Pyr. =

pyrénéen

S-Afr. =

sud-africain

S-Eur.-Mont. =

sud-européen-montagnard

Trop. =

tropical

W-Eur./Médit. =

ouest-européen/méditerranéen

? =

distribution non ou mal connue

Le contingent sud-européen-montagnard (S-Eur.-Mont.) regroupe des taxons dont l'aire de distribution est comprise dans le «domaine des hautes montagnes européennes» au sens de Gaussen (1954) ou «Florengebiet der mittel- und süd-europäischen Gebirge» de HESS & al. (1976–1980). Ce «domaine floristique des montagnes d'Europe centrale et méridionale» (Landolt & Aeschimann, 2005) est celui d'un important cortège de taxons endémiques qui occupe une série de chaînes de montagnes, dont l'ensemble constitue ce qu'Ozenda (1985, 1995, 2009) appelle le «système alpin» ou «orosystème alpin» (Ozenda, 1997, 2009). Outre les Alpes, les chaînes principales de ce domaine sont l'Apennin septentrional et central, les Carpates, les Dinarides et les Pyrénées. Pour plus de détails, voir le «Flora alpina» (1: 17–18).

Certains des 21 contingents précités sont fragmentés pour détailler les origines des xénophytes. Pour cette analyse uniquement, les cinq contingents américain, asiatique, eurasiatique, méditerranéen et tropical se décomposent ainsi en sous-contingents:

Am. =

américain

N-Am. =

nord-américain

S-Am. =

sud-américain

Asiat. =

asiatique

E-Asiat. =

est-asiatique

W-Asiat. =

ouest-asiatique

Cauc. =

caucasien

Eurasiat. =

eurasiatique

Eur./W-Asiat. =

européen/ouest-asiatique

Médit. =

méditerranéen

Médit./Asiat. =

méditerranéen/asiatique

Pantrop. =

pantropical

Néotrop. =

néotropical

Paléotrop. =

paléotropical

Résultats et discussions

Biodiversité par étage de végétation

1. Familles

Les familles les plus vastes sont listées dans le tableau 1, qui mentionne aussi le nombre total de familles représentées à chaque étage de végétation. On recense 147 familles à l'étage collinéen, sur les 148 que compte la flore des Alpes selon Aeschimann & al. (2004, 2011). Les Empetraceae sont en effet absentes de cet étage inférieur, car présentes seulement aux étages montagnard, subalpin et alpin. Vingt-cinq familles sont exclusives de l'étage collinéen (p. ex. les Elatinaceae, les Najadaceae et les Staphyleaceae), sans toutefois être listées en bas de ce premier tableau, car trop faiblement représentées dans les Alpes. Le nombre de familles présentes décroît en fonction de l'altitude, mais 95 sont encore recensées à l'étage subalpin, soit 64%. A l'étage alpin, seules 60 familles sont dénombrées et l'on en déduit que 88 familles (presque 60%) sont exclusives du regroupement des trois étages inférieurs, ne franchissant donc pas la limite altitudinale des forêts (p. ex. les Alismataceae, les Malvaceae et les Resedaceae). On ne compte plus que 21 familles (14%) à l'étage nival, où cinq d'entre elles, les Asteraceae, Poaceae, Saxifragaceae, Brassicaceae et Caryophyllaceae, réunissent près de 62% des taxons, ce qui corrobore les conclusions d'études locales, comme celle de Reisigl & Pitschmann (1958). D'autre part, on constate que les Asteraceae et les Poaceae sont les deux familles les mieux représentées à chaque étage et que leur pourcentage de taxons augmente même un peu dans les étages supérieurs. Ainsi, elles rassemblent près de 31% des taxons de l'étage nival, contre seulement 20,3% à l'étage collinéen. Relevée notamment par Körner (2003: 14), la position dominante de ces deux familles en altitude est confirmée. Quelques familles occupent des rangs assez stables dans le haut du classement, comme les Brassicaceae et les Caryophyllaceae. Cependant, de manière générale, les rangs des familles de même que leurs nombres et pourcentages de taxons varient énormément d'un étage à l'autre, comme le mentionnent OZENDA (1985: 234) et Ozenda & Borel (2003: 59). Ainsi, certaines familles voient leur rang régresser lorsqu'on s'élève dans les étages de végétation, notamment les Apiaceae, Fabaceae, Lamiaceae, Liliaceae, Orchidaceae, Rubiaceae et Euphorbiaceae. Pour les Fabaceae et les Lamiaceae (en gras sur le tableau 1), la chute de représentation est importante. En effet, les Fabaceae comptent 239 taxons (6,8% et 3e rang) à l'étage collinéen, mais plus que 3 (2% et 10e rang) à l'étage nival. Un constat comparable est fait en Corse par Jeanmonod & al. (2011: 13–15). On dénombre 130 taxons chez les Lamiaceae au collinéen (3,7% et 9e rang), mais seulement 11 (1% et 22e rang) à l'étage alpin et plus aucun à l'étage nival. Le classement d'autres familles progresse en revanche en fonction de l'altitude, par exemple celui des Campanulaceae, Gentianaceae, Primulaceae, Salicaceae et Saxifragaceae. Pour les Saxifragaceae et les Primulaceae (en gras sur le tableau 1), la progression est très forte. Ainsi, avec 31 taxons (0,9%), les Saxifragaceae n'occupent que le 21e rang à l'étage collinéen, mais elles rassemblent 59 taxons (2,5%) à l'étage subalpin, ce qui les place au 12e rang de cet étage, et elles passent au 3e rang à l'étage nival, avec encore 20 taxons (13,2%). Quant aux Primulaceae, elles sont au 22e rang à l'étage collinéen (30 taxons, 0,9%), mais elles passent au 14e rang dans le subalpin (53 taxons, 2,2%) et se retrouvent au 6e rang à l'étage nival, avec encore 8 taxons (5,3%). En chiffres absolus, de nombreuses familles comptent un maximum de taxons dans les étages inférieurs, notamment les Asteraceae, Poaceae, Fabaceae et Rosaceae. En revanche, les Brassicaceae, Caryophyllaceae, Ranunculaceae et Campanulaceae par exemple comptent un nombre maximal de taxons à l'étage montagnard. Les Salicaceae rassemblent le plus de taxons aux étages montagnard et subalpin (chaque fois 31 taxons). Enfin, les Gentianaceae, Primulaceae et Saxifragaceae montrent clairement un maximum de taxons au subalpin.

Tableau 1.

Nombre de taxons présents par famille dans chaque étage de végétation (classement décroissant) et pourcentage sur le total de taxons recensés dans l'étage. La flore totale (endémiques, indigènes et xénophytes) est considérée. La dernière ligne donne le nombre de familles présentes par étage et le pourcentage sur les 148 familles de la dition. Quatre familles dont la variation de représentation au fil des étages est très forte sont indiquées en gras (voir le texte). Les 35 familles réunissant chacune plus de 20 taxons à l'étage collinéen déterminent le nombre de lignes du tableau.

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2. Endémiques par famille

Le tableau 2 liste toutes les familles qui comportent au moins un taxon endémique dans un étage, par ordre décroissant du pourcentage d'endémiques. A l'étage collinéen, 32 familles sur 147 sont concernées (pourcentage en figure 1) et le taux d'endémiques par famille ne dépasse pas 34% (Campanulaceae); pour 6 familles seulement ce taux est ≥ 10%. A l'étage montagnard, 36 familles sur 123 sont concernées et le taux d'endémiques par famille atteint au maximum 43,5% (Campanulaceae). C'est à l'étage subalpin que le nombre de familles comportant au moins un taxon endémique est le plus élevé, soit 38 sur 95, et le taux maximal d'endémiques par famille atteint 47,4% (Campanulaceae); pour 28 familles ce taux est ≥ 10%. A l'étage subalpin également, le plus grand nombre de taxons endémiques par famille est atteint, soit 55 chez les Asteraceae. D'autres familles comme les Saxifragaceae, Primulaceae, Violaceae, Gentianaceae, Caryophyllaceae, Rubiaceae et Poaceae comptent aussi un maximum d'endémiques au subalpin. Les 295 taxons endémiques recensés à l'étage alpin se répartissent sur 30 familles et 12 d'entre elles y ont un taux d'endémiques ≥ 33,3%, le maximum étant de 70% (Rubiaceae); pour 27 familles sur 30 ce taux est ≥ 10,8%. C'est à l'étage alpin que le plus grand pourcentage de familles comportant au moins un taxon endémique est atteint, soit 50%, avec 30 familles sur 60 (fig. 1). A l'étage nival, 10 familles sur 21 réunissent les 46 endémiques recensés et toutes y ont un taux d'endémiques compris entre 16,7% et 55%. A chacun des cinq étages, le taux d'endémiques des Campanulaceae est très élevé (34–54%) et cette famille occupe le haut du classement (1er-4e rang). C'est aux étages montagnard et subalpin qu'on dénombre le plus de Campanulaceae endémiques (27), comme entre autres chez les Crassulaceae, Ranunculaceae et Apiaceae. Le taux d'endémiques des Dipsacaceae augmente régulièrement de l'étage collinéen (19,4%) à l'étage alpin (60%) et elles passent du 3e au 2e rang, mais comptent un maximum d'endémiques au montagnard (15). Les taux d'endémiques des Saxifragaceae et Primulaceae augmentent aussi et ces familles atteignent l'étage nival où elles occupent respectivement le 1er et le 2e rang, avec 55% et 50% d'endémiques. Le nombre total de Rubiaceae diminue régulièrement au fil des étages, alors que leur taux d'endémiques augmente fortement, jusqu'à 70% à l'étage alpin (1er rang), mais elles disparaissent ensuite à l'étage nival. Les nombres d'Orchidaceae suivent une évolution comparable à ceux des Rubiaceae. Les deux plus importantes familles de la flore des Alpes, les Asteraceae et les Poaceae, ont aussi un nombre de taxons qui décline et un taux d'endémiques qui augmente en fonction de l'altitude, si bien qu'à l'étage nival on retrouve ces deux familles au 3e et 6e rang, avec respectivement 44% et 31,8% d'endémiques. Les Asteraceae, Campanulaceae, Dipsacaceae, Orchidaceae, Poaceae, Primulaceae, Rubiaceae et Saxifragaceae figurent en gras sur le tableau 2.

3. Genres

Les genres les plus vastes sont listés dans le tableau 3, qui mentionne aussi le nombre total de genres représentés à chaque étage de vég étation. On recense 891 genres à l'étage collinéen, sur les 932 que compte la flore des Alpes selon Aeschimann & al. (2004, 2011), soit 95,6%. Le nombre de genres présents décroît en fonction de l'altitude, mais 533 sont encore représentés à l'étage subalpin, soit plus de la moitié d'entre eux (57%). A l'étage alpin, seulement 271 genres sont recensées, soit moins de 30%. On ne compte plus que 62 genres (6,7%) à l'étage nival, où les Saxifraga, Draba et Androsace réunissent ensemble pr ès de 22% des taxons. D'autre part, on constate que le genre Carex, le plus vaste de la flore des Alpes avec 115 taxons (Aeschimann & al., 2011: 39), occupe le 1er rang aux étages collinéen, montagnard et subalpin, mais le 2e rang à l'étage alpin et seulement le 7e à l 'étage nival. En revanche, le genre Festuca, second de la flore des Alpes avec 70 taxons, occupe ce 2e rang du collinéen au subalpin, mais encore le 3e rang aux étages alpin et nival. Certains genres voient leur rang régresser lorsqu'on s'él ève dans les étages de végétation, notamment les Allium, Bromus, Centaurea, Crepis, Euphorbia, Galium, Geranium, Lathyrus, Orobanche, Potamogeton, Rumex et Vicia. Pour les genres Galium, Euphorbia et Centaurea (en gras sur le tableau 3), la chute de représentation est importante. Les Galium comptent en effet 40 taxons (3e rang) à l'étage collinéen, mais plus que 10 à l'étage alpin (15e rang) et disparaissent à l'étage nival. Les Euphorbia sont au nombre de 39 (4e rang) à l'étage colliné en, 33 au montagnard (8e rang), 11 au subalpin (24e rang), 1 à l'étage alpin (24e rang) et ce genre disparaît à l'étage nival. On dénombre 35 Centaurea au collinéen (6e rang) et même 40 au montagnard (4e rang), mais seulement 18 au subalpin (17e rang) et plus que 4 à l'étage alpin (21 e rang), ce genre disparaissant aussi à l'étage nival. Le classement d'autres genres progresse en revanche en fonction de l'altitude, par exemple celui des Achillea, Androsace, Artemisia, Cerastium, Draba, Gentiana, Luzula, Minuartia, Poa, Primula, Salix, Saxifraga et Sempervivum. Pour les genres Saxifraga, Draba et Androsace (en gras sur le tableau 3), la progression est très forte. Avec 20 taxons (0,6%), les Saxifraga n'occupent en effet que le 16e rang à l 'étage collinéen, mais rassemblent déjà 31 taxons au montagnard (9e rang), 51 taxons au subalpin (3e rang), puis 47 et 20 taxons aux étages alpin et nival, respectivement 4,3% et 13,2% (1er rang à chacun de ces deux étages). Les Draba ne comptent que 3 taxons au collinéen, 6 au montagnard, 11 au subalpin (24e rang), 15 à l'étage alpin (10e rang) et encore 7 (4,6%) à l'étage nival où ce genre occupe le 2e rang. Quant aux Androsace, on en dénombre 3 au collin éen, 7 au montagnard, 18 au subalpin (17e rang), 17 à l'étage alpin (8e rang) et encore 6 (3,9%) à l'étage nival où ce genre occupe le 3e rang ex aequo avec les Festuca. Ainsi, les quatre genres Saxifraga, Draba, Androsace et Festuca rassemblent plus du quart des taxons de l'étage nival (25,6%). Il faut encore noter que dans le tableau 3, certains genres ne figurent qu'à l'étage nival: Agrostis, Alchemilla, Arenaria, Braya, Doronicum, Oreochloa, Pritzelago, Saussurea, Sesleria et Trisetum. Ils ne sont toutefois pas exclusifs de l'étage nival et occupent aux autres étages des lignes infé rieures non publiées sur ce troisième tableau. En revanche, le genre Oreochloa, ainsi que onze autres genres, soit monospécifiques, soit ne comprenant qu'une seule espèce dans les Alpes, sont exclusifs du regroupement des étages subalpin, alpin et nival: Braya , Chamorchis, Eritrichium, Hugueninia, Lloydia , Loiseleuria, Murbeckiella, Oxyria, Petrocallis , Rhizobotrya et Wulfenia. Seul le genre Braya est exclusif du regroupement des étages alpin et nival.

Tableau 2.

Nombre de taxons présents et endémiques de la dition, par famille et dans chaque étage de végétation, avec le pourcentage de taxons endémiques sur le total de taxons recensés par famille dans l'étage (première clé de tri : classement décroissant selon le pourcentage de taxons endémiques ; seconde clé de tri : classement décroissant selon le nombre de taxons endémiques). La flore totale (endémiques, indigènes et xénophytes) est considérée. Huit familles faisant l'objet de commentaires dans le texte sont indiquées en gras. Toutes les familles réunissant au moins un taxon endémique dans un étage figurent dans ce tableau.

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Fig. 1.

Pourcentages de familles et de genres comportant au moins un taxon endémique, dans chacun des cinq étages de végétation (% sur le nombre de familles ou le nombre de genres recensés dans l'étage).

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4. Endémiques par genre

Le tableau 4 liste par étage les genres dont les nombres de taxons endémiques sont les plus élevés. A l'étage collinéen, 80 genres sur 891 (53 listés) comportent au moins un taxon endémique (pourcentage en figure 1). C'est à l'étage montagnard qu'un maximum de genres est concerné: 128 sur 735. Au subalpin, étage où le plus grand nombre de taxons endémiques par genre est atteint (25 Saxifraga), 126 genres sur 533 comprennent des endémiques. A l'étage alpin, 93 genres sur 271 comptent au moins un taxon endémique. A l'étage nival, ce sont 24 genres sur 62, soit le pourcentage maximal de 38,7% (fig.1), et les taux d'endémiques par genre y varient de 20% à 100% (moyenne à 56% et six genres ≥ 75%). A chacun des cinq étages, le nombre de Saxifraga endémiques est très élevé (de 5 à 25 taxons) et ce genre occupe le haut du classement (1er-3e rang). Les Campanula comptent un nombre maximal de taxons endémiques (18) à l'étage montagnard, mais leur taux d'endémiques est maximal aux étages alpin et nival (50%). Les Festuca comptent un nombre maximal de taxons endémiques au subalpin (20), mais leur taux d'endémiques est maximal à l'étage alpin (51,4%). La situation des Gentiana et des Phyteuma est similaire: 13 (31%) et 11 (55%) endémiques respectivement au subalpin, et 11 (31,4%) et 10 (60%) à l'étage alpin. En revanche, le vaste genre Carex ne montre que peu d'endémiques et donc des taux très bas (≤ 5,2%). Les genres Androsace, Artemisia, Draba et Minuartia sont bien classés tant à l'étage alpin qu'au nival. Les Moehringia comptent un nombre maximal de taxons endémiques au montagnard (8), mais leur taux d'endémiques est maximal à l'étage alpin (75%) et très élevé à l'étage collinéen (70%). Les Achillea comptent un nombre maximal de taxons endémiques aux étages subalpin et alpin (7), mais leur taux d'endémiques est maximal à l'étage nival (100%). Quant aux Primula, c'est à l'étage subalpin qu'elles comptent un nombre maximal de taxons endémiques (11) et un taux maximal d'endémiques (45,8%). Il en va de même pour les Salix: 5 taxons endémiques à l'étage subalpin, soit 16,7%, ce genre ne faisant donc pas partie de ceux dont «la proportion d'endémiques est particulièrement élevée», comme l'affirment Ozenda (1985: 59) et Ozenda & Borel (2003: 58). Enfin, même si le nombre total de Galium diminue régulièrement au fil des étages, leur taux d'endémiques augmente par contre fortement, passant de 5% au collinéen à 70% à l'étage alpin, mais ce genre disparaît ensuite à l'étage nival. Les genres Achillea, Androsace, Artemisia, Campanula, Carex, Draba, Festuca, Galium, Gentiana, Minuartia, Moehringia, Phyteuma, Primula, Salix et Saxifraga figurent en gras sur le tableau 4.

Tableau 3.

Nombre de taxons présents par genre dans chaque étage de végétation (classement décroissant) et pourcentage sur le total de taxons recensés dans l'étage. La flore totale (endémiques, indigènes et xénophytes) est considérée. La dernière ligne donne le nombre de genres présents par étage et le pourcentage sur les 932 genres de la dition. Six genres dont la variation de représentation au fil des étages est très forte sont indiqués en gras (voir le texte). Les 40 genres réunissant chacun plus de 15 taxons à l'étage collinéen déterminent le nombre de lignes du tableau. Pour l'étage nival, seulement 4 genres sont listés sur les 26 qui ne comptent qu'un seul taxon (critère de choix : taxon endémique).

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Tableau 4.

Nombre de taxons présents et endémiques de la dition, par genre et dans chaque étage de végétation, avec le pourcentage de taxons endémiques sur le total de taxons recensés par genre dans l'étage (première clé de tri: classement décroissant selon le nombre de taxons endémiques; seconde clé de tri: classement décroissant selon le pourcentage de taxons endémiques). La flore totale (endémiques, indigènes et xénophytes) est considérée. Quinze genres faisant l'objet de commentaires dans le texte sont indiqués en gras. Les 53 genres réunissant chacun au moins deux taxons endémiques à l'étage alpin déterminent le nombre de lignes du tableau. Pour l'étage collinéen, les genres réunissant au moins un taxon endémique et un pourcentage > 14% sont listés. Pour les étages montagnard et subalpin, les genres réunissant au moins deux taxons endémiques et des pourcentages respectifs > 10% et ≥ 40% sont listés. Tous les genres réunissant au moins un taxon endémique à l'étage nival sont listés.

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Taxons présents

Le tableau 5 regroupe les nombres et pourcentages de taxons présents à chacun des cinq étages de végétation, ainsi que dans quatre regroupements d'étages. C'est à l'étage collinéen qu'on dénombre le plus de taxons, soit 3515, représentant 78,4% des 4485 taxons traités dans ces analyses. Le nombre de taxons décroît en fonction de l'altitude, mais 2400 sont encore représentés à l'étage subalpin, soit plus de la moitié d'entre eux (53,5%). A l'étage alpin, on compte encore 1099 taxons (24,5%), ce qui corrobore l'évaluation de Favarger (1972a) à 1049 taxons, reprise notamment par Theurillat (1995), Theurillat & al. (1998) et Ozenda & Borel (2003), puis affinée par Ozenda & Borel (2006: 6) qui dénombrent 1092 taxons sur la base du «Flora alpina». Seuls 152 taxons subsistent en revanche à l'étage nival (3,4%), un nombre conforme à celui donné par Ozenda (1985: 235). N'étant pas relatifs à une superficie de référence, ces nombres de taxons par étage n'informent pas sur la richesse aréale en fonction de l'altitude et ne permettent donc pas de vérifier directement que cette richesse atteigne «un léger maximum dans l'étage subalpin», comme l'affirment Ozenda & Borel (2006: 6). Le regroupement des étages subalpin, alpin et nival compte 2433 taxons (54,2%), alors que celui des étages collinéen, montagnard et subalpin en compte 4452 (99,3%). Contrairement au nombre total de taxons, celui des endémiques présents s'accroît du collinéen au subalpin, pour atteindre un maximum de 411 à l'étage subalpin (sur 501 recensés dans la dition, soit 82%), une tendance comparable à celles observées en Autriche par Essl & al. (2009: 2552–2553), dans le sud-est de la France par Médail & Verlaque (1997: 274, 276), et dans les Alpes maritimes italiennes par Casazza & al. (2005: 367). On compte encore 295 endémiques à l'étage alpin (59%) et même 46 à l'étage nival. Ces résultats confirment les pourcentages d'orophytes parmi les endémiques évalués à 60% au moins par Pawlowski (1970: 210–211) pour l'arc alpin et à 69% par Tribsch & Schönswetter (2003: 483–484) pour les Alpes orientales, ainsi que la proportion d'environ deux tiers mentionnée par Ozenda & Borel (2003: 58). En revanche, le comptage de 265 endémiques à l'étage alpin effectué par Ozenda & Borel (2006: 7) sur la base du «Flora alpina» n'est pas conforme. Les xénophytes sont surtout présents au collinéen, soit 494 (sur 502 recensés dans la dition), et l'on en compte 241 au montagnard, l'étage où la flore indigène totale est la plus diversifiée, avec 3084 taxons. On ne dénombre plus que 52 xénophytes au subalpin et un seul à l'étage alpin.

Tableau 5.

Nombre et % de taxons présents par étage de végétation, ainsi que les nombres de taxons endémiques de la dition (% sur le total des taxons de l'étage, % sur les endémiques+indigènes de l'étage et % sur 501), indigènes, endémiques+indigènes (= flore indigène totale) et xénophytes (% sur le total des taxons de l'étage). Le bas du tableau donne les valeurs par regroupement d'étages et la dernière ligne correspond à la flore totale, tous étages confondus (voir aussi Aeschimann & al., 2011: 39).

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Tableau 6.

Nombre de taxons exclusifs par étage de végétation (% sur le total des taxons de l'étage, voir le tableau 5), ainsi que les nombres de taxons endémiques exclusifs (% sur les endémiques de l'étage), indigènes exclusifs (% sur les indigènes de l'étage), endémiques+indigènes exclusifs (% sur les endémiques+indigènes de l'étage) et xénophytes exclusifs (% sur les xénophytes de l'étage). Le bas du tableau donne les valeurs par regroupement d'étages et la dernière ligne correspond à la flore totale, tous étages confondus.

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Tous étages confondus, le taux d'endémisme pour les Alpes est de 11,2% (tableau 5, ligne C-M-S-A-N), si l'on se réfère au nombre total de taxons recensés, soit 4485 (y compris les xénophytes); mais ce taux monte à 12,6% si l'on compare le nombre d'endémiques au nombre total de taxons indigènes uniquement, soit 3983 (= endémiques+indigènes, xénophytes exclus). Ces résultats sont donc supérieurs à l'estimation de 7 à 8% effectuée par Ozenda (1985: 59). Le taux d'endémisme varie énormément d'un étage à l'autre et s'accroît régulièrement en fonction de l'altitude (fig. 2). En effet, ce taux n'est que de 4,3% (5% de la flore indigène totale) à l'étage collinéen, mais il passe à 17,1% (17,5%) au subalpin, puis à 26,8% (26,9%) à l'étage alpin et atteint son maximum de 30,3% à l'étage nival, soit un pourcentage six fois plus élevé qu'au collinéen. Ce résultat infirme la remarque d'Ozenda (1985: 62) selon laquelle «curieusement, l'étage nival est pauvre en endémiques», ainsi que celle de Körner (2003: 17): «endemic species […] are usually less frequent in the summit floras». Au-dessus de la limite altitudinale des forêts (regroupement des étages alpin et nival), on peut considérer qu'un peu plus du quart des taxons présents sont endémiques des Alpes, ce qui confirme l'évaluation de Favarger (1972a).

Fig. 2.

Pourcentages de taxons endémiques, indigènes et xénophytes, dans chacun des cinq étages de végétation (% sur le nombre de taxons recensés dans l'étage).

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6. Taxons exclusifs

Le tableau 6 regroupe les nombres et pourcentages de taxons exclusifs de chacun des cinq étages de végétation, ainsi que des quatre regroupements d'étages. Seul l'étage collinéen compte un nombre élevé de taxons exclusifs, soit 778 (22,1%), dont 260 xénophytes (plus de la moitié de ceux dénombrés à cet étage). Parmi les endémiques, c'est toutefois à l'étage montagnard que les exclusifs sont les plus nombreux, soit 21, ce qui représente plus de 58% des taxons exclusifs de l'étage, avec par exemple Alyssum wulfenianum, Hesperis inodora, Knautia carinthiaca et Saxifraga paradoxa. Neuf taxons sur les 20 exclusifs de l'étage alpin sont des endémiques, soit 45%, avec par exemple Androsace wulfeniana, Papaver sendtneri et Soldanella austriaca. Aucun taxon n'est exclusif de l'étage nival. Concernant les orophytes, on note encore que 20 taxons sur 33 exclusifs du regroupement des étages alpin et nival sont endémiques, soit plus de 60%! Le nombre de 644 «alpines strictes» (limitées aux étages alpin et nival) avancé par OZENDA & BOREL (2006: 6) demeure inexplicable. Dans le regroupement des étages subalpin, alpin et nival, 173 taxons sur 382 exclusifs sont endémiques, soit 45,3%. Le regroupement des étages montagnard, subalpin, alpin et nival (non figuré sur le tableau 6) compte 970 taxons exclusifs (sur 3707), dont 351 endémiques, soit 36,2%. Sur 491 endémiques recensés dans ce regroupement, 71,5% en sont donc exclusifs.

Alpes occidentales et orientales

1. Généralités

Le tableau 7 regroupe les nombres de taxons présents dans chacune des deux parties de la chaîne des Alpes. Malgré leur superficie inférieure (43% de la dition), les Alpes occidentales hébergent 3076 taxons indigènes (non endémiques), soit 151 de plus que les Alpes orientales. Ce résultat confirme la mise en évidence d'une richesse aréale généralement plus grande des Alpes occidentales, surtout à leur extrémité méridionale (Aeschimann & al., 2011: 41–42, 46). Pour plus de 95%, la différence est le fait de taxons appartenant aux contingents floristiques méditerranéen, méditerranéen-montagnard et ouesteuropéen/ méditerranéen. En revanche, les Alpes orientales hébergent 337 endémiques de la dition, soit 49 de plus que les Alpes occidentales, car les foyers d'endémisme sont plus vastes et plus diversifiés dans les Alpes orientales (Aeschimann & al., 2011: 50, 52). Les Alpes occidentales ont toutefois une superficie qui n'atteint que le 75% de celle des Alpes orientales, alors qu'elles hébergent un nombre d'endémiques (288) égal au 85,5% de celui de ces dernières (337).

2. Taxons indigènes, non endémiques

Pour les 3482 taxons indigènes (non endémiques) uniquement, le tableau 8 dresse un comparatif des Alpes occidentales et orientales, par étage de végétation ainsi que pour les quatre regroupements d'étages. C'est à l'étage collinéen que l'écart de biodiversité entre les deux parties des Alpes est le plus élevé, soit 177 taxons de plus dans les Alpes occidentales, appartenant pour plus de 96% aux contingents méditerranéens précités. Aux étages montagnard et subalpin, les nombres de taxons indigènes demeurent plus élevés dans les Alpes occidentales, mais la différence se comble rapidement avec l'altitude (écarts de 60 et 22 taxons respectivement). En effet, dès l'étage montagnard les pourcentages de taxons méditerranéens diminuent fortement (voir plus bas sous «Distributions mondiales: 3. Etages de végétation »). A l'étage alpin, on compte en revanche 16 taxons de plus dans les Alpes orientales et à l'étage nival les valeurs s'égalisent. Tous étages confondus, les Alpes occidentales et orientales partagent un nombre élevé de taxons indigènes, soit 2519. On calcule un fort coefficient de similarité floristique de Jaccard (72,3%), 557 taxons étant propres aux Alpes occidentales (16%), alors que les Alpes orientales n'en comptent que 406 (11,7%). De l'étage collinéen à l'étage nival, le coefficient de similarité augmente régulièrement et passe de 72,7% à 92,5% (facteur 1,3). Ces coefficients sont plus élevés que ceux calculés par Ozenda & Borel (2006: 5–7) pour le regroupement de tous les étages (56%) et celui des étages alpin et nival (56,5%), ainsi que le coefficient présenté par Favarger (1972a: 195) pour les étages supérieurs (76%). En effet, ces auteurs comptent parmi les taxons des Alpes orientales également certains dont l'aire de distribution dépasse un peu vers l'ouest la limite entre les deux parties des Alpes (et réciproquement pour des taxons des Alpes occidentales dont l'aire dépasse un peu cette limite vers l'est), sans toutefois mentionner les critères d'appréciation. De ce fait, leurs résultats sont partiellement aléatoires et ne peuvent être vérifiés. Ainsi, les nombres de taxons propres aux deux parties de l'arc alpin sont plus élevés dans les calculs de ces auteurs, si bien que leurs coefficients de similarité sont plus bas. Etant issus de requêtes informatiques, les résultats présentés dans ce travail sont vérifiables et reproductibles. Les nombres de taxons propres aux Alpes occidentales d'une part et aux Alpes orientales d'autre part correspondent exclusivement à des taxons dont l'aire ne dépasse pas la limite entre les deux parties des Alpes. Dès lors, des comparaisons avec les travaux précités ne sont pas appropriées. De plus, les nombres présentés par Ozenda & Borel (2006: 5–7) correspondent à la flore indigène totale, alors que le tableau 8 ne réunit que les indigènes non endémiques. On peut toutefois obtenir des nombres correspondant à la flore totale par additions entre les tableaux 8 et 9.

3. Taxons endémiques

Le tableau 9 dresse un comparatif similaire au précédent, mais pour les 501 taxons endémiques. De l'étage collinéen à l'étage alpin, contrairement à l'évolution observée chez les indigènes, la différence de nombre d'endémiques entre les Alpes occidentales et orientales augmente, passant de 4 à 36 taxons. Les nombres d'endémiques plus élevés dans les Alpes orientales confirment les valeurs du tableau 7. A l'étage nival, comme pour les indigènes, les nombres d'endémiques sont similaires dans les deux parties des Alpes. Tous étages confondus, les Alpes occidentales et orientales ne partagent qu'un nombre restreint de taxons endémiques de la dition, soit 124. Il en découle un faible coefficient de similarité floristique de Jaccard (24,8%), les endémiques stricts des Alpes occidentales étant 164 (32,7%), alors que les Alpes orientales en comptent même 213 (42,5%). C'est à l'étage montagnard que le pourcentage d'endémiques stricts des Alpes orientales est le plus élevé, soit 42,8%. Contrairement aux indigènes où dominent les taxons communs aux deux parties des Alpes, les endémiques sont donc majoritairement confinés soit dans les Alpes occidentales, soit dans les orientales. Ces résultats expriment le bicentrisme en matière de taxons endémiques de l'arc alpin (à ce sujet, voir entre autres Pawlowski (1970), Favarger (1972a), Ozenda (2009: 1097) et Aeschimann & al. (2011: 49, 51)). Cependant, le coefficient de similarité augmente régulièrement de l'étage collinéen à l'étage nival et passe ainsi de 21,3% à 56,5% (facteur 2,7). Pour les endémiques comme pour les indigènes, on ne saurait comparer les coefficients de Jaccard présentés dans ce travail avec ceux calculés par Favarger (1972a: 195) et OZENDA & BOREL (2006: 7), en raison des motifs évoqués plus haut. Le tableau 9 liste également les taux d'endémisme (ici calculés sur la flore indigène totale). Tous étages confondus, le taux d'endémisme des Alpes occidentales est de 4,9%, alors qu'il atteint 6,5% dans les Alpes orientales. Ces taux augmentent de l'étage collinéen à l'étage alpin, pour atteindre 9,1% dans les Alpes occidentales et 12,4% dans les orientales, une différence conforme aux conclusions de Favarger (1972a: 193) et OZENDA & BOREL (2006: 7), bien que les valeurs respectives des présentes analyses soient évidemment inférieures à celles présentées par ces auteurs. A l'étage nival, le taux est de 7,2% dans les deux parties des Alpes.

Tableau 7.

Nombre et % de taxons présents dans les Alpes occidentales et orientales (superficies en km2 et %), ainsi que les nombres de taxons endémiques de la dition, indigènes, endémiques+indigènes (= flore indigène totale) et xénophytes. Les valeurs plus élevées dans l'une ou l'autre partie des Alpes sont indiquées en gras.

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Tableau 8.

Nombres et % de taxons indigènes (non endémiques) par étage de végétation, dans les Alpes occidentales et orientales (parties latérales), ainsi que les valeurs communes et le coefficient de similarité (partie centrale). La somme des indigènes communs et des indigènes propres à l'une des parties donne le nombre des indigènes présents dans cette partie et vice versa. La somme des indigènes communs et des indigènes propres aux deux parties donne le nombre total des indigènes dans la dition (colonne centrale du tableau 8 = colonne indigènes du tableau 5). Le coefficient de Jaccard (cJ, exprimé en %) est le quotient «indigènes communs / indigènes Alpes» (voir «Matériel et méthodes»). La somme des pourcentages d'indigènes propres et du coefficient de Jaccard égale 100. Les valeurs plus élevées dans l'une ou l'autre partie des Alpes, ainsi que celles du coefficient de Jaccard, sont indiquées en gras. Le bas du tableau donne les valeurs par regroupement d'étages et la dernière ligne correspond à la flore totale, tous étages confondus.

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En s'appuyant sur les 29 divisions administratives établies (Aeschimann & al., 2011: 29), l'«endémisme local» par étage de végétation fait l'objet des figures 3-6 où, pour chaque division, sont indiqués les nombres de taxons n'occupant que 1 à 3 divisions administratives. Comme pour l'«endémisme global» (tab. 5), un maximum de taxons est recensé au sub alpin (fig. 5). Le patron cartographique de l'étage collinéen (fig. 3) montre le bicentrisme le plus accusé et les nombres d'endémiques locaux par division sont très similaires dans les deux foyers, localisés sur la bordure méridionale de la chaîne. Cela corrobore les résultats du tableau 9: un coefficient de similarité le plus faible au collinéen et des nombres d'endémiques comparables dans les deux parties des Alpes. Parmi les taxons exclusifs de l'étage collinéen, des endémiques locaux de l'extrémité sud-occidentale des Alpes sont par exemple Asplenium jahandiezii et Erodium rodiei, alors que Gypsophila papillosa et Moehringia markgrafii sont des exemples d'endémiques locaux des Alpes sud-orientales. A l'étage montagnard (fig. 4), l'endémisme local couvre toute la bordure méridionale et orientale des Alpes orientales et les nombres d'endémiques par division demeurent comparables dans les Alpes occidentales et orientales. Le nombre relativement élevé de taxons recensés dans la division 27 (Styrie) ne s'explique sans doute pas que par sa grande superficie (la plus vaste avec plus de 13 000 km2), mais aussi par l'existence d'importants refuges glaciaires à cet étage de végétation dans le nord-est des Alpes (Niklfeld, 1972). Parmi les taxons exclusifs de l'étage montagnard, des endémiques locaux de cette région sont par exemple Campanula praesignis, Euphorbia saxatilis, Sempervivum pittonii et Thymus widderi. Pour les Alpes orientales, le patron cartographique de l'étage montagnard concorde bien avec celui présenté par Tribsch & Schönswetter (2003: 484). Parmi les taxons exclusifs du regroupement des étages collinéen et montagnard, des endémiques locaux de l'extrémité sud-occidentale des Alpes sont par exemple Arenaria cinerea, Ballota frutescens, Campanula albicans, Campanula fritschii, Centaurea jordaniana (quatre sous-espèces) et Potentilla saxifraga, alors que Festuca eggleri, Knautia ressmannii, Leontodon berinii, Pinguicula poldinii, Stipa styriaca et Tephroseris serpentini sont des exemples d'endémiques locaux des Alpes est-orientales.

Tableau 9.

Nombres et % de taxons endémiques par étage de végétation, dans les Alpes occidentales et orientales (parties latérales), ainsi que les valeurs communes et le coefficient de similarité (partie centrale). La somme des endémiques communs et des endémiques stricts d'une des parties donne le nombre des endémiques présents dans cette partie et vice versa. La somme des endémiques communs et des endémiques stricts des deux parties donne le nombre total d'endémiques de la dition (colonne centrale du tableau 9 = colonne endémiques du tableau 5). Le coefficient de Jaccard (cJ,exprimé en %) est le quotient «endémiques communs / endémiques Alpes» (voir «Matériel et méthodes»). La somme des pourcentages d'endémiques stricts et du coefficient de Jaccard égale 100. Pour chacune des deux parties des Alpes, les taux d'endémiques sont également listés (% du nombre d'endémiques stricts sur le nombre d'endémiques+indigènes présents (= flore indigène totale, en italiques)). Les valeurs plus élevées dans l'une ou l'autre partie des Alpes, ainsi que celles du coefficient de Jaccard, sont indiquées en gras. Le bas du tableau donne les valeurs par regroupement d'étages et la dernière ligne correspond à la flore totale, tous étages confondus.

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En raison du grand nombre d'endémiques présents au subalpin, le patron cartographique de cet étage (fig. 5) est prépondérant et c'est lui qui montre la plus grande similarité avec celui précédemment dressé pour tous les étages confondus (Aeschimann & al., 2011: 52). Au subalpin, les nombres d'endémiques locaux par division commencent à diminuer à l'extrémité sud-occidentale des Alpes, ce qui n'est pas le cas dans les Alpes orientales. Parmi les taxons exclusifs du regroupement des étages subalpin, alpin et nival, des endémiques locaux de l'extrémité sud-occidentale des Alpes sont par exemple Potentilla valderia, Saxifraga florulenta, Saxifraga pedemontana et Stemmacantha heleniifolia subsp. bicknellii, alors que Callianthemum kernerianum, Galium montis-arerae, Linaria tonzigii et Saxifraga presolanensis sont des exemples d'endémiques locaux des Alpes sud-orientales et qu'Achillea clusiana, Cerastium julicum, Papaver alpinum et Saxifraga hohenwartii sont des exemples d'endémiques locaux des Alpes est-orientales. Dans le regroupement des étages alpin et nival (fig. 6), les nombres d'endémiques locaux diminuent dans toutes les divisions, mais de manière plus accusée dans les Alpes sud-occidentales, ce qui concorde avec les nombres du tableau 9, où les Alpes occidentales comptent 36 endémiques stricts de moins que les orientales. Parmi les 33 taxons exclusifs de ce regroupement des étages alpin et nival, des endémiques locaux de certaines régions des Alpes orientales sont par exemple Braya alpina, Draba stellata, Oxytropis triflora, Saxifraga facchinii et Taraxacum handelii, alors qu'aucun exemple de l'extrémité des Alpes sud-occidentales ne peut être cité. De manière générale, les quatre patrons cartographiques des figures 36 coïncident avec la carte des divers foyers locaux d'endémisme dans les Alpes orientales dressée par Tribsch (2004: 755).

Fig. 3.

Carte de la dition avec, par division administrative, le nombre de taxons endémiques occupant à l'étage collinéen un nombre de divisions ≤ 3. Trois classes d'endémisme local sont définies: blanc: 0–9 taxons; gris clair: 10–19 taxons; gris foncé: ≥ 20 taxons.

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Fig. 4.

Carte de la dition avec, par division administrative, le nombre de taxons endémiques occupant à l'étage montagnard un nombre de divisions ≤ 3. Trois classes d'endémisme local sont définies : blanc : 0–9 taxons ; gris clair : 10–19 taxons ; gris foncé : ≥ 20 taxons.

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Fig. 5.

Carte de la dition avec, par division administrative, le nombre de taxons endémiques occupant à l'étage subalpin un nombre de divisions ≤ 3. Quatre classes d'endémisme local sont définies : blanc : 0–9 taxons ; gris clair : 10–19 taxons ; gris foncé : 20–39 taxons ; noir : ≥ 40 taxons.

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Fig. 6.

Carte de la dition avec, par division administrative, le nombre de taxons endémiques occupant dans le regroupement des étages alpin et nival un nombre de divisions ≤ 3. Trois classes d'endémisme local sont définies : blanc : 0–9 taxons ; gris clair : 10–19 taxons ; gris foncé : ≥ 20 taxons.

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Distributions mondiales

1. Totalité des taxons

Le nombre de taxons constituant chacun des 21 contingents floristiques établis est donné sur l'histogramme de la figure 7. Pour l'ensemble de la chaîne alpine, la part relative de chaque contingent peut ainsi être évaluée, ce qui comble une importante lacune soulignée par Ozenda (1985: 54). Avec 1262 taxons, le cortège floristique sud-européen-montagnard regroupe 28,1% des 4485 taxons recensés dans la dition (près de 32% des 3983 taxons endémiques+indigènes) et occupe de ce fait le premier rang. Dans les Alpes, les 501 endémiques de la dition forment le noyau de ce cortège floristique (40%). D'autre part, 227 taxons sur 1262 (18%) montrent une aire de distribution chevauchant les Alpes et une seule des principales chaînes de ce domaine floristique. Ainsi, les Alpes ont 77 taxons en commun avec les Dinarides, 66 avec l'Apennin, 44 avec les Pyrénées et 40 avec les Carpates. La contiguïté des Alpes avec les Dinarides et l'Apennin transparaît dans ces chiffres. Les 534 autres taxons du cortège floristique sud-européen-montagnard (42%) montrent diverses distributions dans le système alpin, soit assez larges (64%), soit plutôt centrées à l'est (20%) ou à l'ouest (16%).

Le second rang revient au cortège floristique méditerranéen, qui compte 779 taxons. En y ajoutant les 63 taxons méditerranéens- montagnards, cela donne un total de 842 taxons (18,8%). Le contingent européen occupe le troisième rang, avec 759 taxons auxquels peuvent s'ajouter les 41 taxons européens-montagnards, soit un total de 800 taxons (17,8%). Ces trois premiers contingents réunissent près de 65% des taxons recensés dans les Alpes. En y ajoutant les 62 taxons ouest-européens/méditerranéens (1,4%), environ deux tiers des taxons sont alors concernés. Un pourcentage supérieur à 82% est atteint lorsqu'on ajoute le contingent eurasiatique complet, au total 726 taxons (4e rang), soit 16,2% (631 taxons eurasiatiques, 85 taxons eurasiatiques/américains et 10 taxons eurasiatiques/africains).

2. Xénophytes

Avec 123 taxons, soit 24,5%, le contingent floristique américain est le plus représenté parmi les 502 xénophytes (figure 8) et le sous-contingent nord-américain domine nettement (98 taxons). Au second rang vient le contingent asiatique avec 116 taxons, soit 23,1%, où le sous-contingent est-asiatique est le plus important (53 taxons). Le troisième rang revient au contingent méditerranéen avec 112 taxons (y compris cinq taxons méditerranéens-montagnards), soit 22,3%. Viennent ensuite les contingents eurasiatique (46 taxons, 9,2%), européen (34 taxons, 6,8%) et tropical (30 taxons, 6%, où domine le sous-contingent néotropical avec 15 taxons). Les trois xénophytes du contingent sud-européen-montagnard sont Alchemilla mollis, Campanula ramosissima et Telekia speciosa.

3. Etages de végétation

Le tableau 10 donne par étage de végétation le nombre de taxons de chaque contingent floristique. L'histogramme de la figure 9 exprime pour chaque étage les pourcentages des deux plus importants contingents de la dition (sud-européenmontagnard et méditerranéen, cf. fig. 7), ainsi que ceux du contingent arctico-alpin, qui occupe le second rang aux étages alpin et nival. Au collinéen, le cortège méditerranéen devance le cortège sud-européen-montagnard, qui occupe seulement le 4e rang, après les contingents européen et eurasiatique; ces quatre contingents réunissent 75,3% des taxons. Au montagnard, le cortège sud-européen-montagnard est le plus important et le méditerranéen se trouve relégué au 4e rang; les quatre premiers contingents réunissent 77,6% des taxons. C'est à l'étage montagnard que les contingents méditerranéenmontagnard et européen-montagnard comptent le plus de taxons (52 et 40 respectivement). Il en va de même pour les contingents eurosibérien et eurosibérien/nord-américain, qui réunissent 259 taxons au total (7,8%), parmi lesquels beaucoup d'éléments du cortège floristique boréal. Dès l'étage subalpin, le cortège sud-européen-montagnard prend une position dominante avec 1076 taxons, soit 44,8%. Les trois premiers contingents réunissent 71,9% des taxons et le cortège méditerranéen n'en compte plus que 145, soit 6%. En revanche, c'est au subalpin que le cortège arctico-alpin compte le plus de taxons, soit 97 (4%), si bien qu'il y occupe le 7e rang. A l'étage alpin, les deux cortèges sud-européen-montagnard et arctico-alpin réunissent 74,3% des taxons et le cortège méditerranéen n'occupe plus que le 10e rang, avec 10 taxons (0,9%). Au nival, sept contingents seulement sont représentés et les deux cortèges sud-européen-montagnard et arctico-alpin réunissent 92,8% des taxons.

Sur les 2433 taxons du regroupement des étages subalpin, alpin et nival (tab. 5), 1103 font partie du cortège sud-européen- montagnard, soit 45,3%, et 102 appartiennent au cortège arctico-alpin, soit 4,2%. C'est dire que ces deux cortèges constituent près de 50% de la flore de ce regroupement d'étages et sur les 382 taxons qui lui sont exclusifs (tab. 6), 307 sont sud-européen-montagnards (80,4%) et 52 arcticoalpins (13,6%). Ces deux cortèges réunissent donc 94% des taxons exclusifs du regroupement d'étages. Une comparaison détaillée avec les nombres réunis par JEROSCH (1903) pour 420 espèces de la flore d'altitude des Alpes helvétiques est inopportune, notamment par le fait que les territoires considérés ne sont pas identiques. Cependant, la présente analyse et celle de cette auteure montrent toutes les deux le poids très important des deux cortèges précités aux étages subalpin, alpin et nival.

4. Divisions administratives

Les cartes des figures 10 et 11 donnent respectivement par division les pourcentages de taxons des cortèges sud-européenmontagnard et arctico-alpin. C'est sur la bordure méridionale des Alpes orientales et l'extrémité sud-occidentale des Alpes que le cortège sud-européen-montagnard est le mieux représenté (fig. 10). Ce résultat est conforme avec les patrons cartographiques des figures 3-6, ainsi qu'avec les cartes d'endémisme précédemment dressées (AESCHIMANN & al., 2011: 51–53). Dans le sud-ouest des Alpes françaises, le poids relatif du cortège sud-européen-montagnard est moindre en raison de la part importante prise par le cortège méditerranéen (fig. 12). Dans le nord-est des Alpes autrichiennes, c'est en revanche surtout le contingent eurasiatique (fig. 13) qui joue ce rôle de contrepoids. Le patron cartographique de la figure 11 montre que la proportion du cortège floristique arctico-alpin est la plus forte dans les deux régions caractérisées par des altitudes élevées et/ou celles où la représentation du cortège méditerranéen est la plus faible (Alpes pennines, bernoises et rhétiques, Tirol et nord-ouest des Alpes orientales). Le cortège arctico-alpin est le plus faiblement représenté dans les régions dont les altitudes sont moindres et à la fois où les poids des cortèges méditerranéen ou eurasiatique sont forts: divisions 3 (Alpes-de-Haute-Provence et Var), 4 (Drôme et Vaucluse) et 29 (Basse-Autriche et Burgenland). Les patrons cartographiques des figures 12 et 13 sont complémentaires. Les Alpes sud-occidentales et sud-ouest-orientales sont celles où le cortège méditerranéen est le mieux représenté, alors que son poids est faible dans les Alpes nord-orientales, à l'exception de la division 29. En revanche, le nord-est des Alpes autrichiennes montre une forte proportion de taxons à distribution eurasiatique, le pourcentage de ce contingent étant maximal dans la division 29, soit 25,7% (fig. 13). En effet, de nombreux taxons des régions à climat continental atteignent les Alpes dans cette zone, parmi lesquels les exemples suivants sont très caractéristiques: Atriplex oblongifolia, Bupleurum affine, Conringia austriaca, Euphorbia nicaeensis subsp. glareosa, Hieracium echioides, Inula oculus-christi, Iris pumila, Polygala major, Scorzonera cana, Thesium arvense, Verbascum speciosum et Viola ambigua. Le climat sec de cette bordure nord-est des Alpes (voir le «Flora alpina»: 1: 44) convient aussi à certains taxons méditerranéens (fig. 12), ce qui explique le taux de 9,1% dans la division 29. Le patron cartographique de la figure 13 montre que le poids du contingent eurasiatique diminue du nord-est au sud-ouest des Alpes.

Fig. 7.

Nombre de taxons constituant chacun des 21 contingents floristiques établis. En gris foncé le cortège floristique sud-européen-montagnard, le plus important des Alpes. Total : 4485 taxons.

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Fig. 8.

Nombre de taxons xénophytes présents dans 25 contingents ou sous-contingents floristiques. Les contingents américain, asiatique, méditerranéen, eurasiatique, européen et tropical sont distingués par une alternance des fonds d'étiquettes de sous-contingents, blancs ou gris. Total : 502 taxons.

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Une corrélation positive (figure 14, R2 = 0,78) peut être établie entre le poids relatif du cortège floristique méditerranéen (patron cartographique de la figure 12) et la richesse aréale dans chaque division administrative (Aeschimann & al., 2011: 46). D'autres cortèges jouent également un rôle, comme le sud-européen-montagnard, dont le pourcentage maximal dans la division 21 (Trento) par exemple permet d'y expliquer la richesse aréale élevée. Il en va de même pour le contingent eurasiatique dans la division 29. Cependant, la richesse aréale est aussi influencée par d'autres facteurs en interaction: diversité des substrats et des milieux, topographie, conditions climatiques et vicissitudes du passé comme les glaciations (secteurs refuges périphériques: voir les diverses cartes d'endémisme précitées).

5. Familles et genres

Le tableau 11 liste les neuf familles qui comportent dans les Alpes plus de 50% de taxons appartenant au cortège floristique sud-européen-montagnard. Parmi ces familles, sept montrent un taux d'endémiques de la dition dépassant 20% (Aeschimann & al., 2011: 47), ce sont les Campanulaceae, Crassulaceae, Dipsacaceae, Gentianaceae, Primulaceae, Saxifragaceae et Thymelaeaceae. Parmi les 56 genres dont l'ensemble des taxons recensés dans les Alpes font partie du cortège floristique sud-européen-montagnard, 19 sont endémiques ou subendémiques du système alpin, soit 33,9%, ce sont: Adenostyles, Aposeris, Berardia, Grafia, Hacquetia, Homogyne, Horminum, Hugueninia, Laburnum, Molopospermum, Myrrhis, Oreochloa, Paederota, Physoplexis, Pritzelago, Rhizobotrya, Soldanella, Tozzia et Trochiscanthes. Cette liste peut être sujette à discussions au gré de l'évolution des conceptions génériques. Pour obtenir une liste complète des genres endémiques du système alpin, il conviendrait d'y ajouter ceux qui sont endémiques d'une ou plusieurs autres chaînes de montagnes du système.

Tableau 10.

Nombre de taxons appartenant à chacun des 21 contingents floristiques, par étage de végétation. L'ordre des contingents est celui de la figure 7 (flore totale, tous étages confondus). Les trois cortèges documentés en figure 9 sont indiqués en gras.

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Fig. 9.

Pourcentages de taxons appartenant aux trois cortèges floristiques méditerranéen, sud-européen-montagnard et arctico-alpin, dans chacun des cinq étages de végétation (% sur le nombre total de taxons recensés dans l'étage).

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Fig. 10.

Carte de la dition avec, par division administrative, le pourcentage de taxons appartenant au cortège floristique sud-européen-montagnard (% sur le nombre de taxons recensés dans la division, seule la flore indigène totale étant ici considérée (= endémiques+indigènes), xénophytes exclus). Quatre classes sont définies : blanc : ≤ 20,4%; gris clair : 20,5–23,4 %; gris foncé : 23,5–26,4 %; noir : ≥ 26,5%.

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Fig. 11.

Carte de la dition avec, par division administrative, le pourcentage de taxons appartenant au cortège floristique arctico-alpin (% sur le nombre de taxons recensés dans la division, seule la flore indigène totale étant ici considérée (= endémiques+indigènes), xénophytes exclus). Quatre classes sont définies : blanc : ≤ 2,5%; gris clair : 2,6–3,3%; gris foncé : 3,4- 4,1%; noir : ≥ 4,2%.

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Fig. 12.

Carte de la dition avec, par division administrative, le pourcentage de taxons appartenant au cortège floristique méditerranéen (% sur le nombre de taxons recensés dans la division, seule la flore indigène totale étant ici considérée (= endémiques+indigènes), xénophytes exclus). Quatre classes sont définies: blanc: ≤ 6,9%; gris clair: 7–12,9%; gris foncé : 13–18,9%; noir : ≥ 19%.

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Fig. 13.

Carte de la dition avec, par division administrative, le pourcentage de taxons appartenant au contingent floristique eurasiatique (% sur le nombre de taxons recensés dans la division, seule la flore indigène totale étant ici considérée (= endémiques+indigènes), xénophytes exclus). Quatre classes sont définies : blanc : ≤ 19,9%; gris clair : 20- 21,9 %; gris foncé : 22–23,9 %; noir : ≥ 24%.

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Fig. 14.

Corrélation entre le pourcentage de taxons méditerranéens (fig. 12) et la richesse aréale (en centaines de taxons) dans chacune des 29 divisions administratives de la dition (voir Aeschimann & al., 2011: 46). Seule la flore indigène totale est ici considérée (= endémiques+indigènes), xénophytes exclus.

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Tableau 11.

Nombre total de taxons, nombre de taxons appartenant au cortège floristique sud-européen-montagnard et % dans les neuf familles qui comportent dans les Alpes plus de 50 % de taxons appartenant à ce cortège.

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Le tableau 12 liste les 27 familles qui comportent dans les Alpes au moins un taxon appartenant au cortège arctico-alpin. Seules les Cyperaceae réunissent plus de dix taxons de ce cortège. Parmi les 63 genres comptant au moins un taxon arctico-alpin dans la dition, les neuf suivants se composent à 100% de taxons de ce cortège: Bartsia, Chamorchis, Dryas, Elyna, Kobresia, Lloydia, Oxyria, Rhodiola et Sibbaldia. Pour Arctostaphylos et Tofieldia, ce taux est de 50%.

Tableau 12.

Nombre total de taxons, nombre de taxons appartenant au cortège floristique arctico-alpin et % dans les 27 familles qui comportent dans les Alpes au moins un taxon appartenant à ce cortège.

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Conclusions

Biodiversité par étage de végétation

  1. Environ 60% des familles ne sont pas représentées audessus de la limite altitudinale des forêts. Malgré la décroissance du nombre de familles en fonction de l'altitude, près des deux tiers d'entre elles comptent encore des taxons à l'étage sub alpin. Seulement 14% des familles subsistent à l'étage nival, où cinq d'entre elles réunissent près de 62% des taxons (Asteraceae, Poaceae, Saxifragaceae, Brassicaceae et Caryophyllaceae). Les deux familles les plus vastes, soit les Asteraceae et les Poaceae, occupent les rangs dominants à tous les étages de végétation et rassemblent près de 31% des taxons de l'étage nival. Parmi les familles dont la proportion varie le plus en fonction de l'altitude, celles des Fabaceae et des Lamiaceae régressent de manière importante alors qu'à l'inverse celles des Saxifragaceae et des Primulaceae progressent de façon très forte.

  2. Le nombre de familles comportant au moins un taxon endémique est maximal au subalpin, soit 38, alors que le pourcentage le plus élevé est atteint à l'étage alpin, soit 50%. A tous les étages, le taux d'endémiques des Campanulaceae est très élevé et compris entre 34% et 54%. Le plus fort taux d'endémiques d'une famille est atteint par les Rubiaceae, soit 70% à l'étage alpin, leur nombre total de taxons diminuant beaucoup avec l'altitude. De l'étage collinéen à l'étage nival, les taux d'endémiques des Saxifragaceae et Primulaceae augmentent régulièrement, pour atteindre 55% et 50% respectivement à l'étage nival.

  3. Environ 70% des genres ne sont pas représentés au-dessus de la limite altitudinale des forêts. Malgré la décroissance du nombre de genres en fonction de l'altitude, plus de la moitié d'entre eux (57%) comptent encore des taxons à l'étage subalpin. Seulement 6,7% des genres subsistent à l'étage nival, où trois d'entre eux réunissent près de 22% des taxons (Saxifraga, Draba et Androsace). Le genre le plus vaste, Carex, occupe le premier rang au collinéen, le 2e à l'étage alpin, mais seulement le 7e à l'étage nival, alors que le genre Festuca, second de la flore des Alpes, occupe ce 2e rang du collinéen au subalpin, mais encore le 3e aux étages alpin et nival. Parmi les genres dont la proportion varie le plus en fonction de l'altitude, celles des Galium, Euphorbia et Centaurea régressent de manière importante alors qu'à l'inverse celles des Saxifraga, Draba et Androsace progressent de façon très forte.

  4. Le nombre de genres comportant au moins un taxon endémique est maximal à l'étage montagnard, soit 128, alors que le pourcentage le plus élevé est atteint à l'étage nival, soit 38,7%. A tous les étages, les taux d'endémiques des Saxifraga et des Campanula sont très élevés et compris entre 25% et 55%, ainsi qu'entre 34% et 50% respectivement. Le genre Carex ne compte que peu d'endémiques et donc des taux très bas, ≤ 5,2%, alors que les Festuca comptent plus de 50% d'endémiques à l'étage alpin.

  5. Le nombre global de taxons décroît régulièrement en fonction de l'altitude, mais plus de la moitié d'entre eux sont encore représentés à l'étage subalpin, soit 2400. A l'étage alpin, on compte encore 1099 taxons, soit près d'un quart. Seulement 152 taxons subsistent à l'étage nival, dont aucun n'est exclusif. Le nombre de taxons endémiques s'accroît du collinéen au subalpin, pour atteindre un maximum de 411 à l'étage subalpin, et l'on en compte encore 295 à l'étage alpin, ainsi que 46 au nival. Tous étages confondus, le taux d'endémisme est d'environ 12% dans les Alpes. Calculé sur la flore indigène totale (xénophytes exclus), ce taux passe de 5% à 27% de l'étage collinéen à l'étage alpin, pour dépasser légèrement 30% au nival. Autrement dit, au-dessus de la limite altitudinale des forêts, un peu plus du quart des taxons recensés dans les Alpes en sont endémiques. Les xénophytes sont surtout présents à l'étage collinéen, soit 494, et l'on en dénombre plus que 52 au subalpin et un seul à l'étage alpin.

  6. Seul l'étage collinéen compte un nombre élevé de taxons exclusifs, soit 778 (22,1%). Sur 2433 taxons présents dans le regroupement des étages subalpin, alpin et nival, 382 en sont exclusifs, soit près de 16%. Aucun taxon n'est exclusif de l'étage nival. Plus de 58% des taxons exclusifs de l'étage montagnard sont des endémiques et ce pourcentage dépasse 60% parmi les taxons exclusifs du regroupement des étages alpin et nival.

Alpes occidentales et orientales

  1. Malgré leur superficie inférieure, les Alpes occidentales comptent 151 taxons indigènes (non endémiques) de plus que les orientales, essentiellement par l'apport du cortège floristique méditerranéen dans les Alpes sud-occidentales. Les Alpes orientales comptent en revanche 49 taxons endémiques de plus que les occidentales, en raison de foyers d'endémisme plus vastes et diversifiés.

  2. Pour les taxons indigènes (non endémiques), c'est à l'étage collinéen que l'écart de biodiversité entre les Alpes occidentales et orientales est le plus important. La différence se comble en fonction de l'altitude, de manière inversement proportionnelle à la diminution du pourcentage de taxons méditerranéens au fil des étages. A l'étage alpin, on compte ainsi 16 taxons indigènes de plus dans les Alpes orientales. L'augmentation du coefficient de similarité floristique de Jaccard entre les deux parties des Alpes, qui passe de 72% au collinéen à 92% à l'étage nival, s'explique aussi principalement par la diminution du poids relatif du cortège floristique méditerranéen en fonction de l'altitude.

  3. Pour les taxons endémiques, c'est à l'étage alpin que la différence de nombre d'endémiques entre les Alpes occidentales et orientales est la plus importante, la diminution étant plus forte à cet étage dans les Alpes occidentales. Tous étages confondus, les deux parties des Alpes ne partagent que le quart des taxons endémiques, qui sont donc majoritairement confinés dans l'une et l'autre partie. Cependant, le coefficient de similarité floristique de Jaccard passant de 21% au collinéen à 56% à l'étage nival, le bicentrisme est plus accusé dans les étages inférieurs, une conclusion corroborée par les patrons cartographiques d'endémisme local. Les taux d'endémisme augmentent de l'étage collinéen à l'étage alpin, passant de 2,1% à 9,1% dans les Alpes occidentales et de 2,5% à 12,4% dans les Alpes orientales.

Distributions mondiales

  1. Avec 1262 taxons, soit environ 30%, le cortège floristique sud-européen-montagnard est le plus important des Alpes, situées au coeur du domaine des montagnes d'Europe centrale et méridionale. Près d'un tiers des taxons indigènes recensés dans les Alpes peuvent donc être considérés comme endémiques ou subendémiques de l'«archipel de montagnes» du système alpin. Un taux d'endémisme comparable à celui de l'archipel des Canaries (Schönfelder, 1997: 7). Au second rang vient le cortège floristique méditerranéen, avec près de 20% des taxons, suivi des contingents européen (17%) et eurasiatique (16%).

  2. Parmi les xénophytes, le contingent floristique américain est le mieux représenté, réunissant près du quart de ces taxons; il est suivi par les contingents asiatique (23%) et méditerranéen (22%).

  3. A l'étage collinéen, le cortège méditerranéen est le mieux représenté, réunissant plus de 20% des taxons. De l'étage montagnard au nival, c'est en revanche le cortège sud-européen- montagnard qui est le plus important, réunissant 66% des taxons à l'étage alpin et même 76% au nival. Dans le regroupement des étages subalpin, alpin et nival, les deux cortèges sud-européen-montagnard et arctico-alpin constituent ensemble près de 50% de la flore et réunissent 94% des taxons exclusifs du regroupement d'étages.

  4. La richesse aréale est positivement corrélée avec le poids relatif du cortège floristique méditerranéen (R2 = 0,78). Autrement dit, comme les Alpes se trouvent à l'interface entre les biomes tempéré (ou némoral) et méditerranéen, la biodiversité est plus élevée dans les régions de cette chaîne où les éléments méditerranéens enrichissent une flore essentiellement composée de taxons à distribution tempérée.

  5. Neuf familles comportent dans les Alpes plus de 50% de taxons appartenant au cortège floristique sud-européenmontagnard, dont les Campanulaceae qui comptent deux tiers de taxons de ce cortège et montrent le taux d'endémiques de la dition le plus élevé, soit 42,3% (Aeschimann & al., 2011: 47). Dix-neuf genres sont endémiques ou subendémiques du domaine des montagnes d'Europe centrale et méridionale. Seules les Cyperaceae réunissent plus de dix taxons du cortège floristique arctico-alpin. Onze genres montrent une proportion de taxons arctico-alpins supérieure ou égale à 50%.

Remerciements

Nous remercions le Fonds National Suisse de la recherche scientifique (FNS) de son soutien au projet «Contribution à l'étude synthétique de la diversité floristique des Alpes» (no 31- 31244.91 et 3100-031244), ainsi que toutes les personnes ayant collaboré au projet pour une Flore des Alpes. Nos remerciements vont également à Nicolas Wyler pour la production des cartes des Alpes par SIG, ainsi qu'à Pascal Martin et Yves Rasolofo pour leurs conseils et expertises informatiques.

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© CONSERVATOIRE ET JARDIN BOTANIQUES DE GENÉVE 2011
David Aeschimann, Nathalie Rasolofo, and Jean-Paul Theurillat "Analyse de la Flore des Alpes. 2: Biodiversité et Chorologie," Candollea 66(2), 225-253, (1 December 2011). https://doi.org/10.15553/c2011v662a1
Received: 27 January 2011; Accepted: 29 March 2011; Published: 1 December 2011
KEYWORDS
Alpine arc
Alpine orosystem
biodiversity
chorology
Endemism
Flora of the Alps
floristics
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